Expériences de mort imminente : un nouveau modèle scientifique pour les comprendre
Les expériences de mort imminente (EMI) intriguent autant qu’elles fascinent. Lumière au bout d’un tunnel, sensation de quitter son corps, rencontre avec des proches décédés… Ces vécus bouleversants, souvent rapportés dans des situations critiques, soulèvent une question essentielle : sont-ils la preuve d’une réalité au-delà de la vie, ou simplement un phénomène cérébral ?
Une étude récente publiée dans Nature Reviews Neurology par des chercheurs de l’Université de Liège propose un modèle inédit, baptisé Neptune, qui éclaire ces phénomènes sous un angle neurobiologique et psychologique
📚 Martial, C., et al. (2024). The Neptune model: a neurophysiological and psychological framework for understanding near-death experiences. Nature Reviews Neurology. [DOI : 10.1038/s41582-024-00832-1 — lien à titre indicatif]
Qu’est-ce qu’une EMI ?
Les EMI peuvent survenir lors d’un arrêt cardiaque, d’un accident grave, d’une anesthésie… mais aussi dans des contextes plus inattendus comme une syncope, un état méditatif ou un orgasme (source : Greyson, B., 2003, The Near-Death Experience Scale).
Elles se caractérisent par des sensations récurrentes : flottement hors du corps, paix profonde, vie qui défile en un instant.
Selon l’équipe belge du Coma Science Group (Université de Liège), ces expériences seraient le fruit d’une interaction complexe entre biologie du cerveau et traits psychologiques.
🔍 Source : Université de Liège – Coma Science Group
Le modèle Neptune : une approche multidimensionnelle
1. Un point de vue biologique
Lors d’une EMI, le cerveau est souvent confronté à un manque d’oxygène. Ce stress extrême provoque une chute du flux sanguin, des perturbations de l’activité neuronale et une activation de zones clés liées à la mémoire et à la perception.
Ce type de phénomène a été observé dans plusieurs études sur l’hypoxie cérébrale (par exemple : Borjigin et al., 2013, Surge of neurophysiological activity in the dying brain. PNAS).
2. Un terrain psychologique prédisposant
Certaines personnes seraient plus enclines à vivre une EMI, notamment celles capables de se dissocier facilement de la réalité en cas de stress. Ce facteur est déjà étudié dans le cadre des états modifiés de conscience (source : Cardeña, E., 1994, Dissociation and trauma).
La sensation de bien-être ressentie pourrait être liée à une libération massive de sérotonine et de dopamine, deux neurotransmetteurs étudiés dans le contexte des hallucinations et états de conscience altérés (source : Nichols, D.E., 2016, Psychedelics, Pharmacological Reviews).
Un mécanisme de survie ?
Les chercheurs avancent aussi l’idée que les EMI pourraient constituer une forme d’adaptation biologique. En activant les circuits de récompense du cerveau, elles aideraient l’individu à faire face à une situation extrême avec un sentiment de paix et de dissociation.
🔗 Futura Sciences – EMI et cerveau
Quel impact sur la conscience et la santé mentale ?
Comme le souligne Pauline Fritz, co-autrice de l’étude, les EMI offrent une fenêtre unique sur les mécanismes cérébraux aux frontières de la conscience.
Mais elles laissent aussi une empreinte psychologique durable : bien que souvent vécues positivement, 10 à 15 % des personnes rapportent un contrecoup psychologique (angoisses, repli, confusion), ce qui suggère la nécessité d’un accompagnement spécifique.
🧠 Pour aller plus loin :
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Greyson, B. (2007). Near-death experiences and the physiology of death: a view from the edge. Annals of the New York Academy of Sciences
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Parnia, S. et al. (2022). Awareness during resuscitation – A prospective investigation. Resuscitation
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van Lommel, P. (2001). Near-death experience in survivors of cardiac arrest: a prospective study in the Netherlands. The Lancet
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