PATRICK KELLY – HYPNOSE et PHYSIONUTRITION NANTES

3 rue de la biscuiterie  44000 NANTES

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Heures d'ouverture

lun-ven : 13h30-20h00
sam-dim : 09h00-15h30

Les limites de mon langage signifient les limites de mon propre monde. Ludwig Wittgenstein. (tractatus Logico-philosophicus).

Définition (Petit Robert) 

Fonction d’expression de la pensée et de communication entre les humains, mise en œuvre par la parole ou par l’écriture.

Tout système de signes permettant la communication

Réflexions et expérience 

Le langage ericksonien a été l’une de mes plus plaisantes découvertes. Erickson m’est apparu comme un véritable virtuose en matière de communication utilisant les ressources du langage à bon escient, parfois en s’affranchissant subtilement des règles de grammaires, en jouant sur les sens des mots, en véritable maestro, afin d’amener le patient dans l’état de transe propice à l’accomplissement du travail thérapeutique.

Lors de la majorité des apprentissages à une théorie, et c’est aussi vrai pour le patient lors de l’apprentissage à un « domaine de soin » tel que la psychanalyse ainsi qu’à la majorité des pratiques, il lui est nécessaire d’apprendre le langage spécifique de la théorie à laquelle souscrit le psychothérapeute. L’hypno-thérapie au contraire à une considération du langage radicalement différente : c’est l’hypnotiseur qui apprend à utiliser le langage du patient et qui doit se fondre dans sa façon de raisonner (langage métaphorique) et réelle (langage littéral) pour les comprendre et les utiliser vite et bien. Le thérapeute doit se faire caméléon et cette adaptation au langage du sujet qui va permettre un impact et une économie de temps considérable.

Le langage sert plusieurs objectifs propres à chaque phase de la séance d’hypnose :

Lors de ma pratique et pour m’entrainer, je reformule en mode « Hi Fi » ce que me dit le patient en essayant de reprendre au mieux ses propres termes ainsi que le para-verbal qu’il utilise, le rythme et le ton de sa voix. La confusion peut commencer en posant des paradoxes, en simulant l’incompréhension, en « hachant menu » toutes les violations du méta-modèle et en semant habilement des suggestions directes ou indirectes – éventuellement camouflées par seeding avec marquage analogique. Des libertés avec la grammaire peuvent être subtilement prises, mettant au passé les problématiques et au présent les solutions.

Induction : le langage continue à favoriser le relâchement du patient, une disposition à l’acceptation, notamment en jouant sur les « yes-set », les truismes… Il va aussi servir à entretenir la confusion, à dépotentialiser le conscient par l’utilisation de formules complexes telles que la multiplication des négations, les digressions abruptes, les mélanges sans queue ni tête, les omissions et autres surprises l’amenant vers une plus grande absorption. Lors de l’induction, langage et faculté d’observation doivent être très proches, il s’agit de percevoir dans les détails et de façon globale, de déclencher, et de favoriser ce qui apparait comme des signes, d’abord imperceptibles, et qui vont se déployer et indiquer que la transe est en train de s’installer.

C’est lors de cette phase que l’on passe imperceptiblement d’un langage de référence à un langage de pro-réfèrence – Le langage réfère lorsqu’il constate quelque chose, le dénomme : « cela est… », et profère lorsque quelque chose est dit qui n’existe pas encore mais que cette chose advient du simple fait de l’avoir dite; par le pouvoir de la suggestion. Ainsi la ratification réfère et la suggestion, « leading » verbal, profère. L’art de l’induction Ericksonienne se trouve précisément dans la façon de passer de la ratification des phénomènes allant des plus grossiers aux plus subtils afin de produire finalement un phénomène de « conviction» créé par le langage et qui va mener progressivement au « ça y est je suis en transe » accélérateur. C’est à ce moment que se produit le dernier lâcher-prise du conscient – une sorte de « j’abandonne » libératoire, laissant la porte ouverte à la production complète de la transe.

Absorption : Le langage sert à amplifier les processus internes ; il se cale éventuellement sur l’utilisation de canaux de perceptions non préférentiels et augmente ainsi la profondeur de la transe. Suggérer le bruit de la mer, le son du flux et reflux de la marée entre les galets à une personne visuelle va inévitablement approfondir sa transe.

Dissociation : Lors de cette phase, le langage va servir à amplifier le sentiment d’être en même temps, ici et ailleurs. Ce ne sera plus « ton bras » mais le « bras », « tu » mais « Antoine », le « conscient » est au repos et entends ce qui est dit et le sage « inconscient » met en place les ressources utiles et nécessaires à … Ici la machine à phrase est d’une grande utilité pour ne pas rester sec. (Tout comme au cours de l’ensemble de la séance).

Phase de travail : durant cette phase il est essentiel de faire «travailler » le mieux possible le patient au niveau inconscient. Et donc le langage employé doit être un langage de contenant dans lequel le patient pourra placer tout son contenu, tout ce qui lui est propre. Il s’agit pour le thérapeute d’être artistiquement vague. Ce qui est dit doit le rester dans une connotation positive en utilisant des nominalisations, des généralités agréables, des métaphores, en sollicitant habilement les processus internes et émotionnels de la personne. Le thérapeute peut-être le metteur en scène en plantant le décor et en guidant le patient, mais il n’est pas le personnage principal de ce qui se joue.

Ré-association : Le langage va se faire plus précis, son contenu se rapprocher progressivement de la réalité, ici et maintenant. Le ton sera propice au dynamisme, en accord harmonieux avec les ressources trouvées.

Lorsque la Machine à Phrase nous a été présentée en formation (technique permettant de créer des phrases hypnotiques de façon quasi-automatique et sans avoir à réfléchir) , j’ai souri en pensant à une période de ma carrière dans l’informatique. Il y a quelques années j’ai quitté un poste très technique et précis de Responsable d’Exploitation d’une importante Salle des Marchés financiers pour un poste de consultant avant-vente international, sur les pays de l’Est (Russie, Pologne, Ukraine etc.), qui venaient de s’ouvrir au commerce mondialisé et étaient friands de technologies de pointe. J’ai eu à ce moment une grande période de flottement car le langage utilisé dans des postes très techniques est très précis, la façon de faire « droit au but » et concrète, alors que le langage utilisé dans les postes commerciaux et de direction est très généraliste, volontairement imprécis, de nature à donner au client un sentiment de liberté dans le choix de sa solution.

J’ai mis un ou deux ans à m’adapter à ce fait, à apprendre un nouveau langage, à comprendre que dans l’acte de vente l’imprécision linguistique est essentielle pour permettre au client de rêver, de transformer ses besoins implicites (non exprimés) en besoin explicites. Ceci en activant ses processus mentaux internes, en veillant à ne pas l’enfermer dans la contrainte du réel. Ce procédé est bien compris par les hommes politiques. Un ami, orfèvre en matière sémantique, m’a un jour transféré un mail qui blaguait sur le langage du consultant et qui était intitulé « le pipeautron ». A la lecture, il m’est apparu immédiatement que ce mail était extrêmement pertinent et que chaque corps de métier avait son pipeautron bien à lui.